vendredi, janvier 28, 2005

Dans mes petits souliers

CNN – Tsunami – la vague d’infos nous submerge

Ne rien apprendre mais en être informé

Pas même un hoquet
En mangeant mon Kraft Dinner Deluxe
Extra poudre

Et pourtant parfois l’épiphanie :
« Maudit pourri, allume ! »
Fâcheuse impression : vivre mais ceux-là meurent
Sans le mériter
Ni eux ni moi

***

Avoir un vrai job je serais
Inspecteur gouverne-mental
L’invité de Monsieur le Directeur
Du pénitencier
« A-1, bravo, excellentes conditions. »
Sourires entendus ; je touche ma prime

Retour à la maison
J’enlève mes souliers en cuir italien
Impossibles à casser
De toute façon marcher ? je ne vais nulle part
Je ne fais que monter – l’achat du Paradis
Par la peau des gens

Bobonne me suce mais
Il ne me quitte pas ce frisson
Ce rire entendu
Dans le couloir de la mort


dimanche, janvier 23, 2005

Igloo igloo igloo – il est des nôôôtres...

Après quatre-vingt-seize heures de service ininterrompu, le calorifère cesse de ronchonner. Fait assez notable pour que j'ouvre un œil et me dise : " Tiens, il doit faire beau. Enfin ! " Ma phrase à peine finie, il recommence sa litanie. Pour un autre quatre jours ? Fuck.

Mais heureusement, le thermomètre de l'appart. indique à nouveau positif.
Non sans avoir envoyé avant un orteil en éclaireur, je peux penser à m'extirper du lit, enlever ma tuque et mon condom (mesure de précaution : les extrémités gèlent en premier). Hop, à la douche ! En me déshabillant, je retrouve le courage des mes ancêtres cro-magnons, dont je me surprends à envier la pilosité. Disons que je ne ferais pas une pub de Speedo en ce moment. Ni de Wonderbra, remarque, mais ça c'est une autre histoire...

Gremele... rougoudou... frubrougrbplutch. Kessé ça ? Les robinets du bain sont ouverts, mais je n'entends qu'un long borborygme : l'eau ne coule pas. Pas même un filet. Les &%$##** de tuyaus sont encore gelés, encore, encore, encore. Re-fuck.
Suis déjà deux jours en retard, moi, là – le 21 du mois, c'est mon jour de douche... Je vais tout expliquer ce soir à ma date, elle va comprendre, tsé. Pfff...

Les murs sont bourgogne et orange brûlé (les goûts ne se discutent pas), mais c'est tout de même un criss d'igloo à 1000 $ par mois.
L'épisode des Bougon sur le " cachet " du Plateau était vraiment excellent. Trop.

Je pense que je vais finalement aller sonner chez mon inconnue de l'autre jour (voir le texte précédent). Pas pour baiser, mais pour emprunter sa douche. Quoique, on verra bien après...

Si je ne chante pas, j'ai des chances.


jeudi, janvier 20, 2005

Attention, je vous regarde...

Je suis de nature plus spectateur qu’acteur. Voyeur, même. C’est pourquoi j’aime me promener le soir, après le coucher du soleil, avant que les gens ne prennent conscience qu’ils exposent leur intimité au premier venu, avant que ne se referment les rideaux et volets anti-violeurs. Comme ça en passant, regarder dans les maisons, ne serait-ce que pour les idées de déco ou capter en un instant la vie des habitants de mon quartier. Je n’ai qu’une seule règle : ne pas arrêter, quelle que soit la scène croquée. Des flashs de vie, ni plus ni moins.
Flash : Une vieille dame flattant son chat ; pas si seule que ça, finalement. (Je vous vois venir, tordus, vous auriez mieux aimé la jeune fille flattant sa chatte, hein ?)
Flash : Un jeune couple qui prépare le souper en se donnant le bisou des grandes complicités – ceux-là je sais qu’ils auront des enfants.
Flash : Une femme le bras tendu et la bouche ouverte, une vitre qui m’épargne les cris, et en dehors du cadre : l’homme qui attend la fin de l’orage pour s’excuser, encore…
Flash : Gordon qui vroummmmm… ; je n’ai rien vu, il est passé trop vite.
Flash : La pisseuse qui n’a pas fermé la porte de la salle de bain et qui du même coup, se sentant épiée, tourne la tête et me fixe. Deux chevreuils pris dans les phares de la surprise.
Flash : Un boutonneux à l’ordi, l’écran trop tourné vers la fenêtre pour que je ne sache pas qu’effectivement, il est excellent ce site…
Flash : Vous avez compris le principe.

C’est comme ça qu’un soir, en faisant ma petite promenade de digestion Kraftdinnerienne, j’ai presque dérogé à ma règle. Elle n’a fait que passer d’une pièce à une autre, probablement pour aller se changer. Camisole et petites culottes, un corps à damner un saint. Je n’ai pas vraiment vu son visage – l’instantanéité ne propose pas le détail –, mais je sais qu’elle était belle.
Mon pas s’est ralenti, mon pied a hésité… revenir en arrière ? Pourquoi pas, une seule fois, aller sonner chez elle et lui dire bonnement : " Bonjour mademoiselle, je suis Lagreff, pour votre plaisir, et j’ai envie de faire l’amour avec vous. "
Dans un mauvais Bleu-Nuit (y en a-t-il des bons ?), elle aurait dit oui, je t’attendais, entre.

J’ai continué ma route, alors je ne saurai jamais. Mais le fantasme demeure et accompagne mon petit bonhomme de chemin.

La prochaine fois, je sonne ?

Masturbation

Il est une heure du mat. et je me sens seul.
Qui appeler ? Tant de rencontres, tant d’unions ; plein de numéros mais aucun à composer. Pas vraiment de désunions, que des mises au point : pas les mêmes horaires, pas la même soif. Les mêmes buts, oui, mais pas en même temps. Souvent le mot " même " en deux phrases, et pourtant la différence. Je ne pourrais t’aimer comme on aime vraiment, à deux. Il est tard, l’heure où tu te couches. Où idéalement je me coucherais avec toi, serais venu te rejoindre, au pire. Tu as une vraie vie, au sens normatif. Et ma norme est énorme d’énormités.
Tu que j’ai déjà connue, mais ne connaîtrai plus, car j’ai appris : à prendre celles à prendre dans l’instant, passionnément, enivré du moment, au jour le jour – plutôt de soir en matin. En attendant, je me surprends, sentimental, à t’écrire comme un con à une heure du mat.
L’espoir, donc.

lundi, janvier 17, 2005

Soif de silence

Un de ces soirs où sourire fait mal
mais les ivrognes ont soif
les chauds must drink on
dans un coin là-bas un couple
qui s’avale
un autre qui se défait plus loin
à grands coups d’orgueil
éventrant la cohue

On les voit souvent
qui aiment se détester
les dynamiteurs d’harmonie
à jouer à la guerre devant les autres
pour justifier leur amour – terne
jusque dans la collision des silences

Un de ces soirs où sourire fait mal
à téter des bières insipides pour affadir les gris
à fumer comme si on allait mourir demain
et ceux-là qui se lèchent ou se laissent
mais les ivrognes ont soif
" Oui monsieur qu’est-ce que je vous sers ? "


jeudi, janvier 13, 2005

Dis-moi qui tu es

Dépossédé de mon identité – un comique m’a chapardé mon portefeuille –, j’ai dû faire la tournée des grands ducs de la bureaucratie afin de redevenir quelqu’un. Après trois jours d’angoisse à me demander qui j’étais, je suis parti à la quête de moi.
D’abord la S.A.A.Q., puisque le permis de conduire, siège de l’âme, te permet d’accéder aux autres facettes de ta personnalité. (Conduire est dangereux, alors forcément, avec le permis on t’envoie la carte d’assurance-maladie – dont je n’ai pas vraiment besoin d’ailleurs : elle est pleine.)
Fallait me voir, tout miel devant la grosse pousse-crayon aux doigts boudinés d’un orgueil plus grand que Laval.

« – Bonjour madame. Oh, c’est joli ce que vous portez… pure soie, j’imagine ; on voit que vous avez du goût… Ce qui m’amène ? Ah oui, pardon, je m’égare, mais c’est que je me demandais où vous aviez trouvé ce superbe tricot si bien agencé à vos lunettes en écailles.
– Venez-en au fait, monsieur X.
– Voilà : je me suis fait voler et bla bla bla…
– Pas de problème, montrez-moi vos pièces d’identité avec photo et on vous fait une autre carte pour simplement 27,95$.
(Une aubaine !)

Ben justement, épaisse, si j’avais mes pièces d’identité avec photo, je ne serais pas ici en train de contempler ton faciès porcin et ton air si fier de pratiquer le macramé extrême ou le curling sur gazon, me disais-je in petto.
Le problème, c’est que je n’avais comme pièces justificatives que des comptes (ça j’en ai en masse !) ainsi qu’un passeport périmé depuis 16 ans.
Elle le regardait, me matait, le lorgnait, me dévisageait ; continuez comme ça pendant deux minutes aussi longues qu’une vague d’entraide qui suit un tsunami.

– Hi hi, c’est drôle, vous aviez des cheveux à l’époque. Ça vous change. On dirait presque que vous n’êtes pas vous. Ça m’en prendrait plus, vous savez.
– Malheureusement, c’est tout ce que j’ai, lui répondis-je en pratiquant mon sourire sanantoniesque #23.
– Bon, c’est bien parce que je suis bonne pâte (!!!), que vous m’avez l’air sympathique et que j’ai faim (tu parles, j’imagine). »
Puis elle m’explique que le matin réveil des grands départs s’est soldé par un frugal déjeuner aux Capitaine Crounch en route pour le boulot, sur le pont (tiens, j’avais raison).

J’ai finalement eu le droit de savoir que j’étais bien moi à l’aide d’un bout de plastique tendu par la main de la cousine du Big Frère. Ce qui me permit (!) de me procurer une carte de guichet ainsi que d’aller renouveler mes 14 abonnements aux clubs vidéos environnant mon humble logis.

De retour chez moi, ulcéré par la Machine, j’ai décidé de me défouler en faisant du ménage. Tout en bulldozant les monticules de linge, je me disais : « Si jamais j’attrape le cave qui m’a volé, il va passer un mauvais quart d’heure ! »

C’est là qu’il est apparu, s’éjectant d’une jeanesque poche : mon portefeuille.

J’ai attrapé le cave qui m’avait volé. Il ressemble étrangement au gars sur mon permis de conduire. Je ne lui ai pas fait passer un mauvais quart d’heure, non : je lui ai plutôt offert une bière.
Faut savoir pardonner.

Les cons ne sont pas toujours ceux qu’on pense.

mardi, janvier 11, 2005

Aphorisme hivernal


L'on ne fait rien et très vite il ne se passe pas grand chose.

Réféchi sur le miroir de la glace en cette mémorable journée de pêche blanche où le seul poisson qui daigna mordre fut une perchaude à peine plus grosse que les ménés utilisés comme leurres. Et ce... avant mon arrivée.
Heureusement, il y avait les boboys et la bebière. (Je ne sais pas à quoi pensaient Joseph et Marie avec leur âne et leur bœuf, mais il n'y a rien de mieux qu'une truie pour se garder au chaud dans un shack en bois pressé.)
Dix pêcheurs émérites pour un minuscule poisson, pfff, pas de quoi écrire à sa mère ou sur son blog, hein ?
Ah, cette ville qui nous dénature...
En attendant le redoux, je retourne au bar jigger la morue, comme disent les aînés du Plateau...


jeudi, janvier 06, 2005

Modingue

La langue française, cette pute, se laisse malheureusement rarement prendre par derrière.

Inspiré alors que j'essayais d'envoyer une missive virtuelle sans faute à une jolie dame douée pour les mots. (La missive est revenue avec le corrigé.)

Une petite en passant

Mon grand-père disait :
" Le jour où ils vont m'empêcher de boire sur la la job, je rendrai mon badge et mon gun. "

Contée par Benoit Fortier